“Celtique ?” : L’exposition coloniale anti-celtique, anti-bretonne dénoncée en termes justes par l’artiste Gwennyn

“Celtique ?” : L’exposition coloniale anti-celtique, anti-bretonne dénoncée en termes justes par l’artiste Gwennyn

[PNB] L’artiste bretonne Gwennyn a publié une réaction courageuse en réaction à l’exposition coloniale “Celtique ?”, d’inspiration franco-marxiste, au très mal nommé Musée de Bretagne, à Rennes.

A l’heure où l’exposition « Celtique ? » au Musée de Bretagne ferme ses portes et sur le point d’être démontée, je me pose la question sur les motivations réelles de ses instigateurs… Sous le prétexte de vouloir informer la société du produit de leur recherche historique (supposée scientifique et rigoureuse alors qu’en définitive, elle ne l’est pas vraiment), je ne peux m’empêcher de penser que cette expo a surtout été conçue pour mettre à mal une certaine vision de la Bretagne. Une Bretagne celtique rayonnante, aimée, ouverte sur le monde, mystérieuse et poétique dans laquelle je me reconnais. Celle qui a fait émerger tant de petits miracles : bagadoù et cercles celtiques, festivals et festoù-noz, un rêve collectif permanent chanté par nos bardes et nos héros, engendrer nos luttes et nos résistances…

Alors pourquoi vouloir casser tout ça ? Couper la Bretagne de ses origines est une manière de l’isoler, l’asservir, la rendre pauvre et crédule comme l’a fait un certain Colbert en amputant la Bretagne des richesses de la mer, de notre mère… Notre force profonde est enfouie dans cette identité celtique, poétique et fragile, mystérieuse et inclusive. Une véritable sphère d’évasion que la nuit des temps nous a offerte sur un plateau d’argent… une alternative à la raideur de la rationalité latine. Être celtique, c’est écouter son cœur mais c’est aussi faire preuve de raisonnement, comme l’a démontré nombre d’historiens qui se sont exprimés sur le sujet. En effet, la Bretagne est profondément celtique et cette identité s’exprime à travers sa langue, ses noms de lieux, des migrations hors-normes de populations celtes au 6è siècle, ses légendes et croyances (propagation du druidisme puis, influences de l’Eglise d’Irlande), ses paysages et même des maladies génétiques (Hémochromatose)…

Alors… pourquoi ? Peut-être parce que ces historiens avaient besoin d’une certaine reconnaissance auprès d’une pseudo intelligentsia et que ces thèses correspondent aux supputations idéologiques de quelques Jacobins qui se battent en duel, quelque part à Paris, et qui ont la main mise sur les éditos de certains journaux nationaux. Peut-être…

En tout cas, je leur souhaite bon vent… et leur suggère une nouvelle idée d’expo : « Corse ? » à Ajaccio, ou « Basque ? » à Bayonne qui devrait avoir son petit succès également…^^

Alors, « Kenavo, hep distro » 

L’artiste Gwennyn a dit beaucoup de choses pertinentes, de l’ordre de ressenti et de l’instinctif. Ce qu’elle touche du doigt, sans le nommer, est simple à désigner : il s’agit de l’impérialisme du centre parisien, camouflé sous les oripeaux de l’idéologie civilisatrice des droits de l’homme, religion d’état française dont le mandarinat universitaire pense encore, comme la Sorbonne au Moyen-Âge, être tout autant le gardien que le missionnaire. Elle pense fixer le vrai et le faux, l’objectif et le subjectif, dire, implicitement, le licite et l’illicite, donc dicter l’histoire. Pour cette verbeuse université parisienne, les Bretons, sauvages jadis, ploucs aujourd’hui, doivent assumer leur qualités non-sujets historiques, se tenir silencieux, écouter et découvrir ce que eux et leur patrie sont vraiment et se contenter de n’être que l’extension de la volonté de ce mandarinat et du centre parisien qu’il sert. Car enfin, il faut bien l’université parisienne aux Bretons pour apprendre qui ils sont. 

En réalité, la France n’est plus rien, ou presque, et certainement pas une puissance en mesure d’impressionner intellectuellement, et encore moins spirituellement, les Bretons. Il n’existe probablement pas dix Bretons qui rougissent de honte devant la France, en 2022. Le temps est loin où notre peuple, sciemment plongé dans la continentalisation par Louis XIV, pouvait être limité, empêché par la force à notre seule frontière orientale avec la France, donc, à son horizon intellectuel. L’horizon spirituel des Français, c’est Cyril Hanouna. Cela suffit à clore les débats sur la question.

Les Bretons, quoique prisonniers d’une puissante aliénation sous l’effet de la colonisation française séculaire, ont retrouvé, au terme d’une révolution culturelle initiée dès l’émergence de la chouannerie, puis portée par le régionalisme au 19e siècle et enfin l’Emsav au 20e, un réel sentiment de fierté ethnique en l’espace de quarante ans, ce qui, ramené à l’échelle du temps long, est un redressement remarquable. Ils sont face à un vaste chantier de reconstruction nationale qui, en effet, balbutie, mais qui existe. Si la Bretagne n’est pas un autre Limousin, c’est bien grâce aux héros de la résistance nationale et culturelle bretonne.

Cette exposition est une opération verticale, du haut vers le bas, de Paris vers la Bretagne, qui vise, en réaction, à intimider, démoraliser le peuple breton en le faisant douter de ce dont il a pris conscience, de diaboliser ses nouvelles certitudes, de fragiliser la conscience de lui-même qu’il s’est forgé contre les efforts de l’Etat français et de son intelligentsia orgueilleuse. C’est, pour tout dire, une reprise en main coloniale symbolique de la part de l’Etat français.

Cette exposition n’est qu’un procès auquel la nation bretonne refuse de comparaître. Bien plutôt, c’est la nation bretonne qui prépare celle de l’Etat français en Bretagne.

La patrie des égorgeurs de 1793 n’a rien à enseigner aux Bretons, et encore moins la honte de leur propre peuple. En 2022, les Bretons ont appris ceci : les nations subordonnées par la France ont pris conscience d’elles-mêmes, se sont relevées, ont craché au visage du colonisateur et l’ont chassé. Il doit en aller de même en Bretagne, une fois les Bretons pleinement conscients de leur nationalité, pleinement déterminés à redevenir les maîtres de leur patrie. Petite patrie ? Certes, nous ne prétendons pas réformer l’univers, bouleverser les équilibres mondiaux, ni créer de bulle coupée du monde. Nous sommes parfaitement lucides. Mais la modestie ne doit pas mener à l’effacement, ni au reniement. Nous entendons, par respect pour nous, nos enfants et nos ancêtres, être les ordonnateurs de notre réalité, de notre terre, de ne pas tolérer de mainmise étrangère chez nBs. Bref, de chasser le pouvoir français, avec toutes ses marques, loin de Bretagne. Que ce pouvoir se console, il lui restera 63 millions de Français à gouverner et un territoire amputé de 5% de sa masse actuelle. La France, si sûre de sa force, considérera cela avec confiance.

Les Français se passent des jugements des Bretons à leur égard dont ils n’ont, à juste titre, que faire. Les Bretons ne doivent pas avoir une attitude différente. L’heure de la séparation formelle est venue. Ce que les Français feront de leur destin leur appartient. Les Bretons, eux, ne doivent pas se laisser usurper le leur par un état fini. Ils ne doivent pas davantage tolérer l’insulte faite à leur nationalité.

Le courage de l’artiste Gwennyn réside dans le fait qu’en ces temps de relativisme culturel obligatoire et de cosmopolitisme bourgeois à peu de frais, la défense d’un peuple historique est devenu, à cause de l’antiracisme de pure façade du système impérialiste, un moyen facile de faire taire les nations assujetties par Paris. Le colonialisme légitimé au nom de l’antiracisme, la France l’a pensé, l’Etat français l’a fait. 

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