[ISTOR BREIZH] Le 8 décembre 1895 disparaît Théodore Hersart de la Villemarqué, philologue et auteur du livre qui marque la renaissance spirituelle de la nation bretonne, le Barzhaz Breizh.
Étudiant au collège jésuite de Sainte-Anne d’Auray dès l’âge de dix ans puis aux petits séminaires de Guérande (à partir de 1827) et de Nantes (à partir de 1830), il se présente à l’examen du baccalauréat devant la faculté des lettres de Rennes et obtient son diplôme le 30 octobre 1833. En 1834, il se rend à Paris, pour entrer à la faculté de droit. Toutefois, ayant lu The Myrvyrian Archaiology of Wales d’Edward Williams, il se tourne vers les études médiévales et bretonnes, thèmes qui font l’objet d’études à Paris et suscitent un grand intérêt parmi les chercheurs romantiques, comme Jean-François-Marie Le Gonidec. Abandonnant le droit, il suit les cours de l’École des chartes, d’abord en auditeur libre, avant de s’inscrire en 1836. Dès cette année, de même, il commence la préparation du Barzhaz Breizh. Dans ce cadre, il prend des cours de breton, langue dont il n’a alors qu’une connaissance imparfaite, auprès de l’abbé Jean-Guillaume Henry (1803-1880), futur relecteur et « correcteur » du recueil, et à ce titre appelé « l’éminence grise de La Villemarqué ».
Pendant ses vacances au manoir, il collecte à son tour des chants en breton qu’il transcrit avec leur musique sur des carnets de collecte. Conservés par la famille, trois cahiers ont été remis en 1964 par son arrière-petit-fils, le général de La Villemarqué, au chercheur Donatien Laurent. Le premier de ces carnets contient des chants notés surtout à Nizon.
Invité par Lady Augusta Hall et la Cymdeithas Cymreigyddion y Fenny (société des galloisants d’Abergavenny), La Villemarqué prend la tête d’une délégation bretonne composée de Carné, Mauduit, Francheville, Boisrouvray et Marallac’h, ils partent en octobre 1838 pour le Pays de Galles, pour y « étudier à leur source et comparer entre eux l’idiome et les monuments d’origine celtique ». Le 11 octobre 1838, il est reçu à Abergavenny comme barde — sous le nom de « Barz Nizon » (le barde de Nizon) — au sein du collège néodruidique gallois, la « Gorsedd des Druides, Bardes et Ovates de Grande-Bretagne ». Avec les Gallois, il jette les bases du Congrès celtique international. À son retour en Bretagne, il fonde (en 1843 ou en 1857) une « Fraternité des Bardes de Bretagne » (Breuriez Breiz) approuvée par l’archidruide de Galles, mais n’aboutit pas à la création d’une Gorsedd, et l’association disparaît après la mort de La Villemarqué, en 1895.
Grandement nourri du romantisme européen, son travail correspond au modèle d’édition d’une littérature populaire vivante, rassemblée et stylisée, établi par les frères Grimm, qu’on retrouve également chez le serbe Karadžić ou le Finnois Lönnrot avec le Kalevala qui deviendra l’ouvrage marquant la naissance du nationalisme finlandais.
Même si ce n’est pas un succès de librairie avec seulement 500 exemplaires pour l’édition de 1839, 2 000 exemplaires pour celle de 1845, 2 500 exemplaires pour celle de 1867, le Barzhaz Breizh connaît un succès immédiat, parmi les lettrés de la capitale française, mais aussi pour les Bretons de Paris, pour deux raisons : la beauté poétique de l’édition de La Villemarqué et l’attente idéologique, parmi les Bretons, de textes prouvant leur identité historique.
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